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Hospitalière à Saint Jean Pied de Port.

Cela commence par un message reçu de l’association des Amis de Saint Jacques de la Sarthe. Cette année, on recherche des hospitaliers* pour le refuge* paroissial de Saint Jean Pied de Port, ce refuge, je le connais bien puisque depuis quatre années je suis accueillante° au 39 de la rue de la Citadelle pour l’association des Amis de Saint Jacques des Pyrénées Atlantiques et que dans le cadre de cette activité, je connais tous les hébergements de Saint Jean Pied de Port.

Au refuge paroissial, il est préférable d’être deux hospitaliers, pour moi de toute façon c’est mieux car accueillir chaque jour treize pèlerins en demi-pension demande beaucoup d’énergie. Je demande donc à William si l’idée de partager cela avec moi lui convient et comme c’est ok, je lui laisse le soin d’organiser le planning puisque je pars pour l’Espagne sur la Via de la Plata.

Nos deux semaines au refuge succèderont à ma semaine d’accueillante au 39 et doivent même se poursuivre par des vacances en Espagne comme nous l’avions évoqué ensemble. Je propose de visiter Séville, Salamanque, Zafra, Mérida puisque Manoly et Antonio que j’ai rencontrés nous attendent et que je n’ai pas fait beaucoup de visites, seule sur la Via de la Plata. De plus, j’aime visiter les monuments et me balader dans les villes avec William.

Voilà comment je me suis « préparée » quelques semaines enrichissantes mais ô combien éprouvantes !!!!

Juste avant son arrivée, William me téléphone pour me dire de prévenir au refuge de son arrivée. Première flèche empoisonnée que je reçois en plein cœur ! Je ne peux m’empêcher de lui dire qu’il me serait beaucoup plus agréable de l’entendre dire : « ma chérie, j’arrive par le train de midi. » Pour votre information nous sommes en juillet, et nous ne nous sommes pas vus depuis février. De plus, il arrive le vendredi alors que nous ne prenons la relève au refuge que le lundi.

Ma souffrance m’appartenant, je respire et j’accueille. (voir mes outils)

Quelques heures plus tard, après le train et les wagons de pèlerins déversés à l’accueil, nous prenons quelques instants pour nous retrouver et c’est déjà la deuxième flèche empoisonnée que je reçois quand William me dit : « il faut que nous parlions de la date de notre retour d’Espagne parce que ………. » ses raisons lui appartiennent mais cependant, elles me font sortir de mes gonds quelques minutes à nouveau. Puis j’arrive à demander quelques minutes de silence. Non, je ne veux pas que tu partes, je veux juste quelques minutes pour respirer, accueillir mes ressentis : je me sens abandonnée, trahie, prête à t’accuser, toi qui me parles toujours du respect de tes engagements. Décidément, notre collaboration commence sous les meilleurs hospices !

Encore trois jours à l’accueil où bien sûr mon mal-être attire également quelques tensions avec les autres accueillants, tensions que je ne suis pas toujours capable de disperser. Comme souvent, je m’oublie un peu. Heureusement de cette semaine me restent les souvenirs de toutes ces rencontres merveilleuses du chemin et de tous ces instants partagés avec les pèlerins, les touristes, les gens d’ici – une ostéopathe, un magnétiseur, des hospitaliers et particulièrement toi, Fatima, avec qui je pense pouvoir un jour collaborer.

Et puis, je quitte l’accueil un peu plutôt que prévu, c’est à dire en fin de matinée, l’équipe remplaçante étant déjà à pied d’œuvre puisque très habituée, et pour partager un repas avec William avant l’ouverture du refuge à 14 heures.

Je sais déjà, pour avoir passé quelques semaines avec William, que nous cheminons ensemble mais aussi que nous avons beaucoup de points de divergence et le fait de vivre 24 heures sur 24 avec son miroir, mets l’accent largement autant sur les divergences que sur les convergences . Cela me permets surtout de faire le point sur mon évolution, de mesurer le chemin parcouru depuis une dizaine d’années.

Ces deux semaines sont difficiles pour l’un comme pour l’autre. Pas toujours capable d’écouter mon propre ressenti, de l’accueillir, je suis un peu agressive, beaucoup intolérante (voir une autre expérience que nous avons partagée et qui m’a permis de prendre conscience de cela), il m’arrive encore d’user un peu du chantage affectif, bref un peu éloignée de l’amour inconditionnel en ce qui concerne mes proches.

En écrivant ceci, j’ai une pensée pour ma fille qui me disait un jour que je me martyrise.

Non je ne me fustige pas ! J’essaie au mieux, de disséquer ma façon de fonctionner, de prendre de conscience de qui je suis et ensuite de m’accueillir, de m’accepter, de m’aimer comme je suis et de « choisir » la transformation.

« je choisis que ma petite fille soit confortable et en harmonie intérieure lors de ses contacts avec autrui, et je choisis de laisser agir mon essence. »

« je choisis de vivre la tolérance, lorsque je suis dans la volonté de convertir les autres, et je choisis de laisser agir mon essence »

Avant la fin des deux semaines, c’est vraiment difficile bien que je m’octroie des moments de pause : séance d’ostéopathe, coiffeuse, soin du visage, en me rappelant que mieux je suis avec moi-même, mieux je suis avec les autres. Quelques autres moments d’échanges avec Catharina, Patricia et plusieurs pèlerins m’apportent un peu de soutien.

Cependant se pose la question du voyage en Espagne. William est de plus en plus mal, tant physiquement que moralement et moi, je me sens de plus en plus abandonnée et trahie. Pourquoi est-ce justement avec moi qu’il pense à ne pas respecter son engagement ?

Plusieurs jours me sont nécessaires pour accepter cette idée et proposer moi-même de nous séparer à l’issue de cette quinzaine d’hospitalité.

Comme la vie est généreuse avec nous quand nous le sommes avec nous-mêmes, le soir de cette décision arrivent un couple de pèlerins, voisins de William, qui cherchent une solution pour récupérer leur voiture laissée à Miramont. Merci la Vie. Je peux véhiculer William et les pèlerins jusqu’à Miramont et tous retourneront vers la Drôme.

Aujourd’hui, je suis seule en Espagne. Mon séjour en Espagne ne ressemble en rien à ce que j’avais imaginé, il est tout aussi riche d’enseignements.

Bien sûr, je ne peux terminer ce témoignage sans dire encore une fois : « merci William, merci de faire partie de ma vie, de m’accompagner sur mon chemin. Grâce à ces deux semaines que nous avons partagées, je fais un pas de plus sur ma voie.Je t’aime. »

Zafra le 16 août 2013

Pour les non-initiés, le vocabulaire du chemin de Saint Jacques de Compostelle

Refuge ou albergue en espagnol : les lieux où les pèlerins peuvent trouver un lit pour la nuit avec ou sans petit-déjeuner, avec ou sans dîner, avec ou sans possibilité de cuisiner.

Hospitalier(e)s : les personnes bénévoles, le plus souvent ayant pérégriné, qui assurent le bon fonctionnement des refuges.

Accueillants : les personnes bénévoles, le plus souvent ayant pérégriné, qui reçoivent les pèlerins pour les renseigner, leur fournir les documents et répondre à leurs questions.

Tag(s) : #mes expériences de vie
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